lundi 17 décembre 2012


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malgré la présence de la célèbre 22e légion primigénia,
qui avait fait ses preuves, la pacification de la contrée
fut difficile, sinon impossible. Les Mazyques ou Mazices,
peuplade établie dans les « Montes Capientes » (monts
de Tittery) résistèrent longtemps. Soutenus par les
Quinquegentiens qui occupaient le Djurjura, ils exigèrent
contre eux un grand déploiement de forces militaires, et
cette partie de la Mauritanie ne fut définitivement
colonie romaine que sous l'empereur Septime Sévère,
vers l'an 210 après Jésus-Christ.

Qu'était exactement Médéa à cette époque ? Proba-
blement, comme toutes ses voisines, une ville toute
militaire  les Romains avaient leurs « castella » qui
servaient en même temps de forteresses et de refuges
contre les rigueurs des étés de la plaine.

Ville de peu d'importance, cependant, car il n'en est
pas fait mention dans le fragment d'itinéraire qui nous
vient d'un géographe romain, et qui va de Auzia
(Aumale) à Csesarea (Cherchell), en passant par Rapidi
(sour Djouab), Tirinadi (Berrouaghia), Caput Cilani,
Lusafar (Amoura), Acquis (Hammam Righa). C'est à
propos justement de cet itinéraire que l'on a prétendu
voir en Caput Cilani, la ville romaine située sur l'em-
placement qu'occupe actuellement Médéa, mais la
vérification des distances a fait abandonner cette version
et l'on est d'accord pour placer l'agglomération de
Caput Cilani à 21 kilomètres au sud de notre cité
actuelle. Il est certain cependant que Médéa a été bâtie
sur un établissement romain ; les matériaux mêmes de
cet établissement ont servi à l'édification de certaines
maisons. Un aqueduc, qui passe pour avoir été élevé
par les Arabes, porte, dans sa base, des traces très
visibles du travail antique. Les vestiges les plus
précis qui sont parvenus jusqu'à nous, consistent en
assez nombreuses médailles et en quelques inscriptions
fort dégradées aujourd'hui. Parmi les médailles, une
surtout, en argent, a un certain cachet d'authenticité.
Elle fut en possession d'un Juif qui déclara l'avoir
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trouvée au cours des fouilles faites dans sa maison.
Sur une face était une effigie de Juba II, au revers un
croissant surmonté d'une étoile et portant la date XXXIV,
signifiant probablement 34° année du règne. Les ins-
criptions sont plus rares. Celles qui nous sont restées,
fort maltraitées par les intempéries ou la vétusté, ne
nous laissent que peu de lumière sur la période de l'occu-
pation romaine. Les deux principales ont été trouvées en
août 1843, lors des fouilles faites pour la construction
de l'hôpital. L'une qui est sur un couvercle de tombeau
laissa apercevoir les caractères suivants :

M s

RELIUS TERTI

SERANUS

X IT AN (LXXIII. -MX)

TER FECERUNT

dont on peut hasarder cette traduction sans toutefois la
garantir : « Monument consacré aux Dieux Mânes
Aurelius Tertius a vécu 73 ans et dix mois, son fils et
son frère lui ont fait ce tombeau. » La deuxième est
une stèle à frontons, garnie de deux oreilles ; les carac-
tères sont illisibles ; mais on y distingue un buste
grossièrement sculpté et drapé d'un manteau. Quelques
autres inscriptions, sans importance, ont encore été
découvertes un peu partout ; les mots de « Légion » et
de « Equités » qui reviennent presque dans toutes,
nous permettent de conclure à l'existence d'un camp
militaire sur l'emplacement actuel de Médéa.

La domination romaine prit fin vers l'année 650. De
cette date, jusqu'à l'occupation turque qui se produi-
sit au commencement du xvi° siècle, l'histoire du pays
est toute d'invasions et d'insurrections. La première
invasion arabe qui vint jusqu'en Mauritanie eut lieu
en 644. Elle avait à la tête Ouka ben Nali, qui fut
enthousiasmé par la richesse de ce sol inconnu. Les
Arabes qu'il conduisait venaient de la Haute-Egypte et
de la Cyrénaïque. Ces troupes avançant au hasard de
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la guerre se morcelèrent, se fondirent parmi les habi-
tants, s'implantant partout  elles purent se faire
accueillir. D'ailleurs, les indigènes, en révolte conti-
nuelle contre leurs dominateurs, firent toujours cause
commune avec les envahisseurs, En 647, eut lieu une
deuxième invasion. C'est alors qu'apparut Mohamed,
qui répandit parmi les indigènes la religion de l'Islam.
A partir de ce moment, les invasions se succèdent
rapidement. Vandales, Byzantins, Arabes de diverses
régions s'établissent ça et là, se mêlent, s'allient, se
battent et s'exterminent sans que l'on puisse déterminer
leurs possessions et leurs conquêtes. Une domination
ferme s'impose, c'est celle des Turcs qui surgit. Ces
conquêtes successives avaient ruiné le pays et détruit à
peu près tout ce que les Romains avaient laissé de beau;
les Espagnols, voisins de l'Afrique, en avaient profité
pour s'y implanter, et Alger était depuis six ans entre
leurs mains lorsque, en 1516, les frères Baba-Aroudj,
dénommés plus souvent Barberousse, s'emparèrent de
la ville et, ne rencontrant aucune résistance sérieuse,
s'assurèrent du pays par la conquête de quelques villes
principales : Ténès, Médéa, Miliana, Tlemcen. N'étant
pas sûrs de conserver le fruit de leur hardiesse, ils
placèrent tout ce territoire entre les mains du Sultan
de Constantinople. Les gouverneurs, nommés par ce
dernier, portèrent le titre d'Agha puis de Pacha. Mais
tout en restant sous l'autorité ottomane, ces pachas
devenaient de plus en plus puissants ; si bien qu'au
xvm 6 siècle, Ali, Dey d'Alger, s'affranchit complète-
ment du joug turc et érige le pays en Régence d'Alger,
sous son autorité absolue. La régence comprenait trois
provinces : celle de Constantine, d'Oran et de Tittery,
dont la capitale fut Médéa. Le Tittery s'étendait au Sud
jusqu'à Boghar et comprenait, de l'Est à l'Ouest, le
territoire qui s'étend d'Aumale à Miliana. Un bey fut
installé dans chaque capitale, et c'est à ce moment que
Médéa fut réellement bâtie car, jusqu'à cette époque, la
ville n'avait été qu'un amas de masures élevées sur

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