jeudi 1 septembre 2016

L’Emir Khaled présente au Président Millerand, en visite au Mausolée de Sidi Abderrahmane, à Alger, le 20 avril 1922, les revendications du peuple algérien, provoquant un réel incident.
Cela s’est passé un 20 Avril 1922, visite du président Millerand, à Alger
À la fin de la première guerre mondiale, la déclaration en janvier 1918 du président américain Wilson, sur le principe du droit des peuples de disposer d’eux-mêmes, enthousiasme l’émir Khaled. Il lui adresse en mars 1919, une pétition dans laquelle il expose la situation politique du peuple algérien : « Sous un régime dit républicain, la majeure partie de la population est régie par des lois spéciales qui feraient honte aux barbares eux-mêmes. Et ce qui est typique, c’est que certaines de ces lois qui instituent les tribunaux d’exception (tribunaux répressifs et cour criminelle) datent du 29 mars 1902 et 3 décembre 1902 ; on peut voir là un exemple de la Marche Régressive vers les libertés. »
Menant un combat infatigable en faveur des droits politiques et de l’octroi des libertés, l’émir Khaled obtient du gouverneur général Steeg, malgré les démarches hostiles de préfet d’Alger, l’autorisation de s’adresser au Président de la République française. Il profite de la visite d’Alexandre Millerand au mausolée de Sidi-Abderrahmane à Alger, le 20 avril 1922, pour lui adresser un discours. L’Emir Khaled réclame en priorité un développement des libertés et la représentation des Algériens au Parlement français. Dans cette allocution audacieuse, il déclare entre autre : «…Au moment où, d’un bout à l’autre de la terre, le monde, bouleversé par un cataclysme sans précédent, essaye de reprendre son équilibre normal, les musulmans algériens, demandent instamment à la France de leur continuer sa tendre sollicitude en développant les libertés qu’elle leur a déjà si généreusement accordées afin de leur permettre de prendre définitivement rang dans la grande famille française. Ce ne sont pas les quelques réserves ou restrictions nécessitées par leur statut personnel qui pourraient mettre obstacle à leur définitive adoption et vous faire hésiter. »
Selon les observateurs français, « ce ne fut pas un spectacle sans grandeur que de voir le petit fils d’Abdelkader parler presque d’égal à égal avec le Président de la République ». Mais les français d’Algérie ne sont pas de cet avis. Ils répandent vite la nouvelle d’un incident grave. La presse métropolitaine, trompée par les services d’Alger, croit voir dans ce « discours inopiné », « inattendu », « intempestif », un « véritable coup de force » et une « manifestation de nationalisme indigène ».
Aujourd’hui, l’Emir Khaled est quasiment considéré comme le premier nationaliste algérien. Le programme de son Mouvement pour l’égalité ou la réforme est basé sur la revendication de l’égalité entre Algériens et Français en matière de droits et devoirs et la mise en place de réformes politiques concernant les lois répressives.
Opposé à la politique d’assimilation revendiquée par une certaine élite, l’Emir Khaled déclarait quelques années plus tôt, lors de la campagne électorale des municipales d’Alger de 1919 : « Je vous présente une liste musulmane. Tout bon musulman ne doit pas voter pour les Français. N’oubliez pas que vos parents ont tous marché, jadis, au premier signal de mon grand père ». Il sera élu triomphalement.
Zineb Merzouk
Sources :
Mahfoud Kaddache. Histoire du nationalisme algérien. Enal, Alger, 1986.
Ahmed Koulakssis et Gilbert Meynier. L’émir Khaled: premier zaʼîm? : Identité algérienne et colonialisme français. L’Harmattan, Paris, 1987.
Ageron Charles-Robert. Enquête sur les origines du nationalisme algérien. L’émir Khaled, petit-fils d’Abd El-Kader, fut-il le premier nationaliste algérien ? In: Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, N°2, 1966. pp. 9-49.



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